Mars - Semaine 2
Les chansons de Ludovic Gourvennec
Mars - Semaine 2 :
La poésie et la chanson sont souvent parvenues à dire le malaise des générations, souvent jeunes, ce qui ne signifie évidemment pas à résoudre les problèmes soulevés, car, selon moi, la chanson, quand elle colle à l’air du temps, est davantage reflet des problématiques sociales que force agissante pour combler les manques. Mais bon, elle donne à voir certaines tendances contemporaines, comme le mal du siècle a provoqué au 19ème les tensions des œuvres romantiques. En ce 21ème siècle, de « Jeunes et cons » (2003) de Damien Saëz à « A Nous » (2020) de Noé Preszow, les exemples ne manquent pas de morceaux signes de l’air du temps, souvent pessimistes, que les deux dernières années de covid n’auront pas contribué à rendre plus joyeux.
Cette semaine, focus sur le groupe Kyo, intéressant à divers titres.
a)-Quand la variété française choisit des rythmiques et un style rock, est-ce vraiment du rock ? Cette question, depuis la fin des années 70, a nourri les conversations : en gros, pour les puristes, les Berruriers noirs faisaient vraiment un punk-rock « honnête » quand Téléphone créait de la soupe (sous-entendu : du rock pas pur), de la variétoche facile destinée à générer du profit. Autrement dit : quand est-on vraiment rock ? Ou peut-on être rock sans l’être (et inversement : peut-on ne pas être rock en donnant l’impression qu’on l’est) ? Et Kyo dans tout ça ?
b)-Kyo a disparu de la circulation pendant un moment, ce qui est relativement rare. Après un gros succès en 2003-2004 avec notamment le tube « Le chemin » (2003), éclipse de plusieurs années avant un retour en 2014, et plus récemment un re-retour. Ce rapport des artistes à la visibilité (faire en sorte d’être toujours présents sur les réseaux sociaux et dans les médias divers) ou à la discrétion ou la disparition (s’éclipser du jour au lendemain, soit par choix, soit parce que le succès n’est plus là) est souvent intéressant à analyser. Et, conséquemment, se pose la question de l’âge des artistes (après de nombreuses années, peut-on se renouveler et être encore crédibles en tant que créateurs très connus ? peut-on être rock à 50 ans ?) et de l’efficacité et de la portée de son œuvre (comment peut-on encore parler au public jeune qui est arrivé ou le toucher ?).
c)-Des artistes classés dans un registre plutôt « gentil » (en gros, les chansons d’amour, sous toutes les formes possibles) peuvent-ils devenir des phares permettant de mieux comprendre la société ?
Je vous propose ici trois chansons du groupe à 3 époques (c’est assez frappant de voir que les 3 fonctionnent un peu sur le même principe mélodique et rythmique) :
« Le chemin » (2003) / Très gros tube qui les a vraiment lancés :
« Le graal » (2014) :
« Mon époque » (2021) : chanson très récente que j’aime bien et qui me paraît s’inscrire (un peu) dans une forme de miroir désillusionné de la période actuelle, me semble-t-il fortement impacté par la crise sanitaire. (« Ce soir j’ai le mal de mon époque, je remplis des pages » / « Je suis mal dans ma peau, t’es mal dans la mienne » / « Je ne veux pas rester seul ») :
Bon week-end à tous et à toutes.