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Les chansons de Ludovic - Hugues Aufray

(Re)découvrez l'originalité de la chanson française et francophone !
Ludovic Gourvennec

Je suis professeur de français et j'ai effectué l'essentiel de ma carrière à l'étranger. Je suis actuellement en poste dans le réseau des Écoles européennes. J'ai soutenu une thèse de doctorat consacrée à la chanson.

Pour vous aider à exploiter mes chansons en classe, n'hésitez pas à feuilleter mon article tiré de la revue de l'Association belge des professeurs de français "Vivre le français" : "Classe de FLE : 20 activités pour exploiter une chanson"

Ludovic Gourvennec

Nous sommes en 2025 et Hugues Aufray a 95 ans ! La longévité de sa carrière est tout simplement ahurissante. Pionnier des années 60 (lui aussi est sur la photo des yé-yé de Jean-Marie Perrier), il continue d’apparaître dans les émissions de télévision et de faire des concerts avec une vitalité déconcertante. Il est vrai que, dans les figures populaires majeures du XXe siècle s’étant projeté sur le XXIème siècle, on trouve Johnny Hallyday ou Charles Aznavour, mais Hugues Aufray figure en bonne place dans cette lignée des grands artistes qui comptent et ont compté en francophonie, même s’il n’a plus créé de chansons depuis les années 90. 

Il entre dans la carrière en 1959, dans les cabarets parisiens comme on le faisait à l’époque, et il se fait connaître assez vite, notamment avec le désormais classique « Santiano ». Un peu plus tard, après une expérience aux Etats-Unis, il décide d’adapter en France plusieurs chansons de Bob Dylan, qui connaît à l’époque le succès aux USA, et cela sera déterminant pour lui. Mais il ne faudrait absolument pas le réduire à cela : le nombre de chansons « françaises » d’Hugues Aufray, qui sont devenues des standards et que toutes les générations de Français connaissent, est énorme. On les apprenait à l’école, on les chante autour des feux de camp, on les reprend dans les mariages, elles sont profondément intégrées à la socio-culture hexagonale. Il dit d’ailleurs lui-même qu’il se considère comme « un fédérateur ». Et on sent, dans les textes, une sensibilité certaine qui a abordé beaucoup de problématiques et de situations sociologiques concrètes. Voici quelques titres emblématiques.

« Santiano » (1961) : adaptée d’un chant de marin irlandais, cette chanson est vraiment une sorte d’hymne increvable et universel au départ, le désir de partir étant perçu comme une aventure positive, avec le voilier qui incarne l’ailleurs, la découverte, l’Amérique partant du port de Saint-Malo.

Archive (à l’époque, on chantait en cravate) :

« La fille du nord » (1965) : voici une des adaptations d’un (très beau) morceau de Bob Dylan, magnifique inspiration et transcription (ici en version à l’Olympia en 1991).  

Version originale de Bob Dylan :

« Céline » (1966) : cette magnifique chanson, très nostalgique et en fait assez terrible (comme on en produisait beaucoup au XXe siècle dans ce qu’on appelait la « chanson réaliste »), mêle le particulier et l’universel. Céline est à la fois unique, une femme de fiction singulière qui a sacrifié ses désirs et son existence pour que ses proches soient heureux, mais elle est plurielle, devenant symboliquement l’incarnation de toutes les femmes ayant subi les contraintes énormes de la société patriarcale (« sans jamais penser à toi »). Ici en version live avec une guitare à 12 cordes !

« Stewball » (1966) : à nouveau un morceau narratif aux intonations tristes et mélancoliques (à l’image du rythme très lent), d’une chronique familiale dramatique dans laquelle le narrateur enfant raconte l’échec de son père à vouloir gagner aux courses de chevaux. C’est tout simple et profondément terrible et déchirant à la fois.

« Adieu monsieur le professeur » (1969) : cette chanson constitue une sorte d’hymne emblématique, un hommage rendu par des élèves à un professeur qui part à la retraite, et là encore, le particulier vire à l’universel, c’est très touchant. Ici live en 2005.

« Hasta Luego » (1973) : c’est une chanson écho à « Santiano » avec cette fois quelque chose de plus assumé personnellement, de plus urgent.